L’équipe emmenée par E.Gamba s’impose contre l’équipe INSEP. Sucy 3ème.

Crédit : Franck Terlin

Le plateau était alléchant. Deux champions olympiques russes, Arsen Galstyan et Mansur Isaev. Deux jeunes jumeaux très prometteurs, les frères Khalmurzaev. Une équipe géorgienne très jeune mais pas sans talent. Une équipe de France siglée INSEP qui avait fière allure. Alors que la finale vient de s’achever et que Loïc Piétri s’apprête à diriger l’entrainement de masse qui clôt traditionnellement le Tournoi monégasque, le constat est là : ce 21ème Tournoi international de Monaco a été une belle journée de judo.

Russie, Géorgie, France : les forces en présence

Sur la ligne de départ, huit équipes (au lieu des 10 initialement prévues), réparties en deux poules. Russie, Géorgie, France (INSEP), Monaco, Sucy Judo, Judo Kodokan Spello (Italie) et deux équipes PACA.
A lire les compositions, l’équipe qu’avait décidé d’emmener Ezio Gamba, grand manitou du judo russe, avait de quoi faire peur : Galstyan, Isaev, Khasan et Khusen Khalmurzaev. Excusez du peu. Les raisons de ce choix ? Multiples aux dires du maestro italien : « Galstyan et Isaev reviennent de blessure. Ce tournoi sans pression était idéal pour les faire reprendre. Les Frères Khalmurzaev ? Parce qu’ils sont très intéressants et prometteurs et que j’avais envie de les voir à l’œuvre ». Finissant d’évoquer sa sélection, il ajoutera malicieusement qu’il a voulu une équipe russe du « Caucase ». En effet, tous ses combattants viennent de ces petites républiques, d’origine arménienne (Galstyan), Tchétchène (Isaev) ou Ingouche (les frères Khalmurzaev), riches donc de judokas exceptionnels.
Une équipe qui, sans pour autant être facile, faisait parfaitement le job en poule. Galstyan et ses tai-otoshi magnifiques, Khasan Khalmurzaev et ses superbes uchi-mata à gauche, Khusen et ses ko-soto-gake de mammouth.
Seul bémol, la blessure au genou, le même que celui opéré après le Grand Chelem parisien d’Isaev dès le 1er combat. Si il combattait sur une jambe lors de son second combat qu’il remportait au sol, aucun risque n’était pris par Gamba par la suite. Le champion olympique londonien des -73kg, resterait sagement en tribunes, la mine déconfite, attendant sans doute avec impatience et sûrement un peu de crainte le verdict médical.

Du côté français, l’équipe INSEP s’annonçait intéressante à suivre, avec Darcel Yandzi à la baguette et plusieurs judokas parmi ce qui se fait de mieux au niveau français en ce moment, comme Mathieu Thorel (+100kg, 3ème à Villebon il y a un mois) ou le virevoltant et spectaculaire Hugo Fonghetti, (3ème lui aussi en -66kg). Une équipe de France qui prenait le meilleur sur la Géorgie dans le match pour la 1ère place du groupe. Une équipe de Géorgie très jeune, sans vrai leader, mais qui démontra de belles choses lors de cette 1ère partie de journée, avec un -60kg, Tornike Nagliashvili, au visage poupin mais possédant un o-uchi-gari diabolique.
Et Sucy Judo ? On avait plaisir à revoir Mathieu Daffreville en kimono de compétition.  Alors qu’on l’avait laissé sur de pénibles images avec sa blessure lors des France 1ère division à Marseille l’année dernière, le désormais -100kg fit forte impression lors de son 1er combat de poule. Malheureusement pour lui (et pour nous), son genou gauche dit stop lors de son second match. Sans lourd, Sucy se retrouvait donc à 5 combattants pour le reste de la compétition, finissant 2ème derrière les intouchables russes.

Des deux demi-finales du jour, Sucy Judo/France INSEP et Russie/Géorgie, la seconde remportait la palme du suspens puisque la Russie, à six combattants, devaient attendre le dernier combat et un joli travail en juji-gatame  de son -100kg, Zafar Makhmadov, pour gagner son ticket pour la finale.
En effet, l’équipe slave s’est faite peur, menée qu’elle était 2 à 0 (en fait 3 à 0 puisque sans Isaev). En danger, elle s’est sortie de ce piège grâce au talent pur de Galstyan et des Khalmurzaev. Un o-uchi supersonique suivi au sol pour le désormais -66kg. Un uchi-mata « inouesque » du -81kg et un ko-soto au corps-à-corps du -90kg ramenait les deux équipes à égalité. De la tension, du judo pur et de haut-niveau, un esprit d’équipe. La démonstration russe lors de cette demie enthousiasmait.

Disputée avant la finale, la place de 3ème opposait donc Sucy Judo à la Géorgie. Et dans la petite finale, le club francilien réussissait l’exploit de battre l’équipe géorgienne avec seulement 5 combattants. Une remarquable performance.

Une finale de haut vol

En finale, les protégés d’E.Gamba affrontaient donc le groupe de Darcel Yandzi. C’était attendu, aux vues des prestations des deux équipes. L’impatience et l’excitation étaient donc là. La scène finale pouvait démarrer.

Les -60kg ouvraient le bal. Albert Oguzov d’un côté. Louis Masy de l’autre.
Alors que le Russe était apparu comme l’un des « points faibles » de l’équipe durant la journée, sur un magnifique travail en ne-waza il plaçait un juji-gatame au sociétaire du RSC Montreuil. Russie 1 – France 0.
Montaient alors sur le tapis deux des grands animateurs de ce Tournoi. Sur le papier l’avantage était naturellement du côté russe. Galstyan, formidable technicien, faisait forte impression depuis le matin avec son dossard doré dans le dos. Mais on ne pouvait s’empêcher de penser que Fonghetti, gonflé à bloc et lui aussi dans d’excellentes dispositions techniques, avait sa carte à jouer.
En moins d’une minute, l’affaire était réglée. Sur un formidable ippon. Le ippon du jour même, à écouter l’enthousiasme qui montait du public réuni à la salle du Stade Louis II.
Fonghetti avait réussi l’exploit. Il avait battu le champion olympique londonien d’un ura-nage stratosphérique. Du grand art. Le judoka de Sucy Judo avait été l’un des grands animateurs des -66kg à Villebon il y a un mois. Vainqueur ici même l’année dernière en individuel, progressant à chaque sortie, possédant un judo varié aussi bien qu’explosif, ce jeune judoka est indubitablement dans une phase ascendante. On a hâte de le voir à l’international.


Crédit : Franck Terlin

Isaev forfait, la France menait 2 à 1. Mais les frères Khalmurzaev allaient une fois de plus ramener la Russie dans le jeu. Et avec la manière. Khasan, étincelant avec son uchi-mata à gauche très pur, ne laissait aucune chance à Quentin Joubert (SGS Judo). Attendu sur cette technique, le judoka ingouche réussissait pourtant à le placer à force de patience et de fausses pistes. Un vrai beau technicien, qui monte clairement en puissance parmi les -81kg russes. Son frère Khusen, permettait à la Russie de reprendre l’avantage, sur la copie conforme du uchi-mata de son jumeau. Bluffant.
Opposé au jeune Thomas Cherchour, encore junior, il tentait au départ son « spécial », un ko-soto-gake façon « prise de l’ours », après un round d’observation de deux minutes.Et puis, sans crier gare, le -90 kg russe sortait un sublime uchi-mata à droite de sa panoplie. Le judoka de l’OJ Nice ne pouvait que constater les dégâts.


Crédit : Franck Terlin

Le -100 russe avait donc l’occasion d’apporter le point de la victoire face à Seyba Thiam. Très concentré, bien plus subtil judoka que son physique de déménageur le laissait paraître, Makhmadov anticipait un uchi-mata du Français pour lancer un très joli uchi-mata gaeshi. Waza-ari. Une valeur que le judoka de Poissy tentera, vainement, de rattraper, victime du judo tactique et varié de son adversaire russe, capable de passer d’un arraché à un morote sans difficulté. 4 à 1. La victoire était scellée, le Hikiwake du dernier combat entre les lourds était anecdotique.
Si les protégés d’Ezio Gamba l’emportent donc logiquement, Marcel Piétri résumait parfaitement le sentiment commun : « plus que nos amis russes, c’est le judo qui sort grand vainqueur de cette finale ».