Nice Judo conserve son titre

Emre Sanal bat Messie Katanga, un premier point précieux pour Nice contre FLAM91 / Emmanuel Charlot – Esprit du Judo

Le championnat de France par équipes juniors masculines 2014 de judo sera à marquer d’une pierre blanche, non pas parce qu’il a débouché sur des surprises – c’est même l’inverse puisque les équipes médaillées sont exactement les mêmes que l’année dernière (et les sept clubs classés sont eux aussi à peu près les mêmes) – mais parce que la compétition fut d’un niveau d’intensité exceptionnelle. Parce que, aussi, le vainqueur, Nice Judo emporte son deuxième titre de suite… une première en dix ans de présence ininterrompue sur le podium national !

Pas de secret…

Nice Judo donc. Le groupe de Michel Carrière emporte son deuxième titre national dans un contexte d’opposition très élevée et continue à marquer de son empreinte le judo français en figurant pour la dixième fois de suite – une aventure unique dans l’histoire du judo, commencée en juin 2005 – sur le podium par équipes juniors. On peut même parler de onze présences en douze ans, puisque les années précédentes Nice Judo avait fait 5e et 3e. Le secret ? « Vous me posez la question chaque année. » sourit un Michel Carrière au visage fatigué par l’épreuve du jour. « Je vous fais toujours la même réponse : il n’y a en a pas. J’ai la chance d’avoir un bon groupe de jeunes, soudés entre eux et volontaires pour travailler. Nous insistons beaucoup sur le contenu judo, parce que c’est ce qui permet de se sentir fort, de garder de la confiance et de l’énergie en passant des tours facilement. Chaque année nous repartons de zéro, en écartant l’idée d’avoir quelque chose à défendre ou à conserver. C’est tout ce que je vois. »
Pas de secret donc, mais une expression judo au-dessus du lot et une continuité fabuleuse qui force le respect.

Sanal le fanal

Vincent Patricot, 5e des « France » juniors individuels (-55 kg) en léger, puis Sacha Flament, 3e en -66 kg (et champion de France cadets l’année dernière) et Antonin Blandin, 5e dans la même catégorie pour assurer les -73 kg, Pape Ndiaye, 7e du championnat individuel junior… mais aussi cinquième du championnat de France seniors en -81 kg, et Emre Sanal, champion de France junior en lourd (et cinquième en seniors l’année dernière), le Nice Judo a plutôt fier allure. Le SO Givors, futur septième, n’y résistera pas au premier tour, battu par Flament, Blandin et Ndiaye. Ndiaye, Sanal et Patricot écartent ensuite le JC Gradignan, Flament, Blandin et Ndiaye à nouveau sortent ensuite le JCO Roubaix. Les voici en demi-finale, les choses sérieuses commencent.

Nice Judo contre OJ Nice

C’est le frère ennemi, l’Olympic Judo Nice, qui attend les garçons de Carrière au coin du bois. Un groupe très copieux lui aussi deux champions de France dans ses rangs – qui reste d’ailleurs sur une victoire au championnat régional contre Nice Judo.
La rivalité entre les deux clubs est exacerbée et l’ambiance, là-bas dans le coin du tapis 6 de l’INJ, très rapidement électrique. Les combats sont engagés, mais c’est Ndiaye qui met ippon à Otmane et le champion de France poids lours Sanal qui en fait de même avec le champion de France -90 kg Thomas Cherchour, déjà battu au tour précédent par le vice champion de France Joseph Terhec de l’AJ 61 et légèrement touché aux cervicales. Nice Judo mène 2-0, mais Yacine Dehibi, le point fort en léger de l’OJ Nice reprend l’avantage contre Patricot. Tout devient possible car si Sacha Flament est fort, il est opposé à son rival Fabien Biagioli dans un remake de la finale du championnat de France cadets 2012, emporté par Flament. Le combat est incroyable est l’ambiance presque incontrôlable. les garçons se rendent coup sur coup et Biagioli parvient même à se dégager d’un étranglement alors qu’il paraissait avoir passé la lisière de la perte de conscience. Les deux garçons vont au bout d’eux-mêmes, Flament l’emporte. À la fin, leur accolade généreuse et amicale fait du bien à tout les monde. Si les deux clubs sont à couteaux tirés, malgré l’intensité de leur engagement cela ne concerne manifestement pas les combattants, et c’est très bien.

Jour d’orage à l’INJ

Après l’OJ Nice, FLAM91 en finale. Il allait falloir un surcroît de force mentale aux Niçois pour tenir la pression qu’allaient leur mettre les combattants franciliens survoltés. Disons-le, un vrai grand moment de sport, à donner le frisson ! Deux groupes à fond les ballons se disputant la victoire comme la chose la plus importante au monde à ce moment-là, deux entraîneurs dignes et bien posés sur leur chaise, Michel Carrière d’un côté et Cédric Margallejo de l’autre devant un public frémissant, samedi à l’INJ, c’était vraiment bien. FLAM91 ? Le club qui bouge et se montre partout, vainqueur récent de la 2e division chez les garçons. Un groupe « énorme » lui aussi, avec son poids lourd Messie Katanga, vice champion de France, Brahima Keita, vice champion de France lui aussi en -81 kg, Medhi Mekhneche, cinquième au niveau national en – 73 kg, Nzaou Yang-Si, troisième du championnat de France en -60 kg pour assurer les -66 kg, et enfin l’un des membres punis du groupe France au Japon, le -60 kg Walid Khyar en leader des « morts de faim ».
Pourtant ce ne fut pas si simple et FLAM se retrouva même mené 2-0 au second tour par le JC Agathois, puis 1-0 par l’AJ 54. Rien ne fut donné aux Essoniens, dominés au début de l’affrontement par l’Association Judo Loire en quart, Walide Khyar battu et déçu au troisième combat par Vincent Manquest face à l’AJA Paris XX le finaliste de l’année dernière en demi. Mais arrivés là, les gars du 91 n’allaient pas lâcher le morceau facilement. Un combat décisif se jouait d’entrée entre Katanga et Sanal, et c’est le Niçois Sanal qui préservait facilement son autorité actuelle sur les jeunes lourds en projetant Katanga sur un o-soto-makikomi tout en force, enchaîné au sol. Mais Khyar, tout ébouriffé et orné d’un bandeau d’élasto comme une peinture de guerre, livrait un combat de chat exceptionnel contre Patricot, très courageux, mais qui volait littéralement en éclats. Et, coup de théâtre, Yang-Si en « arracheur suprême » disposait assez vite de Sacha Flament avec une détermination contagieuse. Le « momentum » était en train de passer du côté des Franciliens… Le ceinture maron Antonin Blandin allait se hisser à la hauteur de l’enjeu pour Nice. Marquant d’entrée un waza-ari ultra précieux, il allait ensuite s’accrocher éperdument aux branches, à moitié lucide à la fin du combat tellement il était « carbonisé » par l’inlassable pression de Mekhneche, qui ne manqua de rien sur ce combat, sauf de concentration au début et d’un peu d’intelligence tactique tout du long pour obtenir le ippon ou la 4e pénalité qui chauffait terriblement dans les mains de l’arbitre. Sauvé du naufrage par cet incroyable combat, Nice pouvait reprendre la main avec le brillant Pape Ndiaye, posé et dangereux. Sauf que c’était Brahima Keita en face, qui partait à l’abordage, jouant aussi avec habilité le coup pour déstabiliser son adversaire et le faire pénaliser. Pari réussi pendant toute la première partie du combat qu’il mena largement par des pénalités pour garde croisée données par un arbitre proche de la surchauffe dans cette ambiance d’orage tropical. Mais Ndiaye n’est manifestement pas n’importe qui. Réussissant une fois à poser correctement ses deux mains il enroulait, rageur, Brahima Keita en mouvement de hanche, explosant au passage dans un final hollywoodien le panneau d’affichage numérique. Dantesque ! Selon la nouvelle règle, l’action était valable et le ippon fut donné. Quelle finale ! En vieux sage Margallejo concluait sobrement par « nous avons mérité de perdre ce combat-là et les Niçois ont su le gagner ». Décidément, on vous le dit, un bon moment de judo français.

Un écran d’affichage en moins et le point décisif pour Nice Judo avec Pape Ndiaye contre Brahim Keita / Emmanuel Charlot – Esprit du Judo